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« C’est un fiasco ! »

Innover, sortir des sentiers battus n’engage pas seulement un changement de posture de l’enseignant.e au niveau de son métier mais de l’individu dans son rapport au changement. Imaginer des nouvelles activités, de nouveaux projets engage une part de courage mais provoque également des attentes. Très naturellement, on anticipe, on espère des retombées positives pour soi…quelque chose qui nous donnera envie de continuer à être innovant, à sortir de sa zone de confort.

Lorsque j’ai commencé à changer mes pratiques d’enseignement, il y a quelques années, je n’ai eu de cesse de m’émerveiller à chaque cours. Je me rappelle avoir pensé que je n’aurais pas assez d’une vie pour raconter tout ce qui se déroulait au sein de mes classes…J’étais sortie de ma zone de confort et mes attentes étaient comblées. Ma sensation était que ce qui se jouait sous mes yeux était « Incroyable ».

Cependant, ce sentiment aurait pu être d’une toute autre nature, une phrase telle que « C’est un fiasco ! » aurait pu être prononcée. Ça a été le cas d’une collègue qui, réalisant une activité que je lui avait conseillée, à prononcer ces mots. Comment une même situation d’apprentissage peut basculer d’un « C’est incroyable » à « C’est un fiasco! » ?

Je pense que pour comprendre ce décalage de perception, il est intéressant se pencher sur les attentes.

Le métier de professeur est très exigeant. Les objectifs à atteindre sont compliqués. Je rappelle que le cahier des charges d’un enseignant est de faire acquérir des savoirs et savoir-faire à des adolescents qui sont contraints d’être scolarisés et qui ont mille et un autres centres d’intérêt que l’école. La transmission ne se réalise donc pas sereinement et facilement.

Les attentes sont multiples : inhérentes à la personne qui exerce la fonction de professeur, influencées par les raisons qui ont poussées cette personne à être professeur, mais aussi par les parents, la direction, la société etc.

Quand j’ai encouragé des profs à tester de nouvelles activités, j’aurais dû porter plus d’attention sur leurs objectifs, leurs attentes et expliciter davantage ceux que je visais dans mes activités.

Lorsque j’imagine un dispositif pédagogique ma seule attente réside dans ce qui va se jouer dans le cerveau des apprenants. Le résultat concret de ce qu’ils réalisent m’importe peu. Par exemple, lorsque je propose à mes élèves de réaliser des maquettes de bâtiments médiévaux je ne m’intéresse absolument pas à la beauté de leurs réalisations. Ce qui se joue dans l’activité c’est la recherche des informations (livres, manuels, internet…) pour déterminer les caractéristiques du bâtiment, la planification du travail, la collaboration dans le groupe, l’autoévaluation du travail etc. Parfois, les élèves n’ont pas réussi à ériger leur bâtiment car leurs compétences en bricolage ne sont pas terribles mais ce n’est pas grave puisque mes attendus se situent ailleurs. La maquette n’est qu’un prétexte pour leur permettre de pratiquer les compétences nécessaires à mon cours d’Histoire.

Le conflit socio-cognitif, la richesse des échanges entre eux et le débriefing rendent l’activité infiniment passionnante pour moi en tant que professeur et constructive pour eux en tant qu’apprenants. Si je ne m’étais concentré que sur le produit final et non sur le processus de réalisation j’aurais ressenti de la déception.

La richesse d’une activité se situe dans le processus et non dans la production finale. Dans cette optique, voici les questions permettant de structurer une activité pédagogique. Quels savoirs, savoir-faire ou compétences les élèves devront-ils utiliser en lien avec ma discipline ? Quelles attitudes de travail devront-ils développer ? Comment le débriefing pourra venir enrichir l’activité ? Etc.

C’est en se posant toutes ces questions, en amont de la construction d’une activité pédagogique, que vous pourrez prendre du plaisir à observer vos élèves travailler, à les voir réaliser les tâches que vous aviez soigneusement prévues.

Concernant les fameuses maquettes certaines étaient objectivement inabouties (voire moches) cependant c’était leur plan de travail, la recherche d’informations, la rédaction du dossier sur leur bâtiment, le travail de groupe que j’ai évalués. La réalisation d’une maquette n’était que le prétexte pour leur permettre de développer diverses compétences et attitudes.

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Une évaluation collaborative

L’idée d’une évaluation collaborative a surgi il y a dix jours dans une de mes classes de 2ème. Le dispositif que je vais vous présenter est assez simple mais ne pourra pas s’appliquer à toutes les classes sans tenir compte de certaines conditions.

J’ai réparti la classe en binômes d’élèves que j’ai choisis. Un.e élève-moteur avec un.e élève plus passif.ve (dans le sens d’un.e élève qui prend difficilement ses apprentissages en main). C’est le critère de l’énergie face au travail qui m’a servi de fil rouge dans les choix de duos.

Les élèves avaient une semaine pour s’entraider à mémoriser les informations à propos des périodes conventionnelles de l’Histoire. Le jour J, ils passeraient l’évaluation individuellement, plus aucune collaboration à ce moment-là. L’astuce de ce dispositif d’évaluation se situe dans les résultats…c’est la note la plus basse des deux qui serait attribuée au binôme.

Au départ, les élèves se sont un peu étonnés et questionnés mais pas d’insurrection. J’ai senti qu’ils avaient envie de tenter l’expérience.

Les binômes ont eu un temps de travail en classe où j’ai pu observer les groupes travailler ensemble, les interactions. Cette étape de travail était déjà très intéressant. Là où certains avaient présupposé que leur co-équipier allait être possiblement un « boulet », ils se sont assez vite rendu compte que chacun avait surtout une manière différente de travailler, un temps de concentration différent, une mémoire photographique etc. Les élèves-moteur ont, quant à eux, rapidement joué leur rôle comme je l’avais supposé.

La particularité de cette classe est qu’une moitié bénéficie d’une motivation intrinsèque ou extrinsèque suffisamment forte pour dépasser les difficultés et se mettre au travail lorsque c’est nécessaire. L’autre moitié est constituée d’élèves qui n’ont pas de méthode de travail efficace et qui n’essaient même pas de se mettre au travail, leur estime d’eux-mêmes ayant été trop souvent égratinée durant leurs années en primaire. La moitié de ma classe avait donc besoin de coachs et cela tombe bien j’en avais une dizaine !

C’est ce combo qui a permis le succès de cette expérience pédagogique.

Les binômes ont organisé leurs révisions pendant une semaine : ils s’interrogeaient dans la cour, s’envoyaient des exercices pour s’entraîner quotidiennement. Les coachs n’ont pas lâché l’affaire car ils avaient envie de réussir et leur réussite dépendaient d’élèves plus en difficultés scolairement. Les élèves plus en difficultés se sentaient soutenus et n’avaient pas envie de faire rater, de décevoir leur co-équipier. Ils étaient totalement interdépendants. La collaboration était dès lors indispensable.

Pour la petite anecdote : une élève m’a raconté qu’elle envoyait dix exercices par jour à son co-équipier via Whatsapp. Le dimanche, occupée par une fête de famille, elle n’a pas envoyé d’entrainements. Elle a reçu un message de son binôme qui craignait qu’elle néglige leur travail…Cela nous a fait rire car l’élève en question a ce genre d’humour, mais surtout ce qui était inédit c’est qu’il réclame du travail.

Le jour J est arrivé et ils n’étaient pas spécialement impatients de passer l’évaluation, pas d’excitation ou de stress particulier. J’entendais des élèves donner quelques derniers conseils à leur binôme.

L’évaluation terminée, je me suis dit qu’il fallait absolument que les élèves aient rapidement leurs résultats. Les résultats par rapport à leurs connaissances acquises mais aussi vis-à-vis des efforts fournis, de l’efficacité du travail d’équipe etc. Laisser passer 24 heures aurait enlevé la magie.

Après leur avoir fait ranger toutes leurs affaires, pour éviter toute triche, je leur ai distribué des fluos pour réaliser la correction directement. Les résultats ont été excellents ! C’était juste incroyable. Parfois même les élèves coachés ont réalisé des sans fautes, là où leur coach avaient fait des erreurs d’inattention. Les élèves se sont félicités, checkés, souri. Il y a eu quelque chose de magique dans cette réussite en équipe.

Finalement, ils ont tellement apprécié l’expérience qu’ils m’ont demandé pour la recommencer, à condition qu’ils puissent choisir eux-mêmes leur co-équipier/ère. Je vous raconterai la suite de cette expérience dans un prochain article.

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Les méthodes qui font réussir les élèves

Il s’agit d’organiser les situations les plus riches et stimulantes possibles, les mieux accordées possibles à ce qu’on veut enseigner et aux élèves qui doivent apprendre, les plus rigoureuses possibles pour que tout soit en place et disponible à qui veut mobiliser sa liberté d’apprendre.

Philippe Meirieu

Je ne me lasserai jamais d’errer dans les rayons de pédagogie des librairies. J’erre parce que je ne chercher rien en particulier. Je laisse un titre, une couverture, une couleur, capter mon attention.

Il y a quelques semaines le titre de cet ouvrage a suscité mon intérêt, ma curiosité et un peu de scepticisme. Etait-ce encore un livre qui tenterait de livrer des méthodes toutes faites ? (Je ne crois pas aux recettes de cuisine en pédagogie).

Ce qui m’a attiré ce sont les mots du titre : « qui font réussir les élèves ». En effet, lorsque l’élève est au centre de la réflexion cela augure souvent que le propos sera intéressant. Et effectivement, passé l’avant-propos de Philippe Meirieu (rien que ça), le premier chapitre est entré en parfaite résonance avec la façon dont je perçois mon métier d’enseignante. Je vous partage un extrait du livre de Danielle Alexandre :

 » Transmettre ou construire des savoirs ?

Concevoir l’apprentissage comme une simple question de transmission de savoirs présuppose que les connaissances ont une existence autonome, indépendante du sujet qui les acquiert, qu’elle peuvent être stockées et donc transmises. L’apprentissage consisteraient alors en une simple accumulation de connaissances nouvelles, l’élève n’étant qu’un contenant vide qu’il suffirait de remplir.

Ce schéma confond information et connaissances. On peut effectivement, par simple lecture ou écoute, enregistrer dans notre esprit, des informations ponctuelles qui ne s’y trouvaient pas auparavant. Mais chacun peut constater la volatilité de ces informations, elles ne deviendront en effet des connaissances stables que si des liens s’établissent avec ce que l’on savait déjà, selon un processus personnel d’intégration, spécifique à chacun. Le maitre délivre donc toutes sortes d’informations mais, pour se les approprier durablement, chaque élève doit effectuer une transformation, un « traitement » personnel que personne d’autre ne peut faire à sa place.

L’histoire du système scolaire entretient la confusion. Le fait que depuis toujours des élèves aient réussi à apprendre malgré un enseignement purement transmissif semble valider l’efficacité d’un tel modèle. Or, les bons élèves sont justement ceux qui réussissent sans aide à reconfigurer leurs connaissances en y intégrant de nouvelles. Quant aux autres, le système scolaire, jusqu’à une période récente, se contentait de les exclure par paliers successifs, selon des modalités de sélections affichées et ceci dès la fin du CM2 [5ème primaire pour la Belgique] : examen d’entrée en 6ème puis sélection sur dossiers, orientation selon trois filières. Les nostalgiques ce cet ancien système gomment cet aspect essentiel : les conséquences élitistes d’une telle conception de l’apprentissage qui ignore complètement les processus individuels à l’oeuvre et laisse l’élève se débrouiller seul, conception incompatible avec un école qui vise authentiquement la réussite de tous.

Le travail du maitre ne se limite donc pas à délivrer des informations [qui sont extérieures au sujet] et à être garant du savoir , son rôle est de créer les conditions pour que chaque élève puisse les transformer en connaissances. »

La lecture de cet extrait montre à quel point le rôle de l’enseignant est bien d’imaginer des situations d’apprentissages afin de CONSTRUIRE des savoirs. Envisager l’enseignement sous cet angle engage tout enseignant à placer au centre de sa réflexion la ou les personne/s qui va/vont recevoir son enseignement. Pour qu’un.e ado/enfant devienne élève, il est indispensable d’organiser des activités qui lui permettront de gravir les marches qui le mèneront vers une maitrise de savoirs. Sans quoi il ou elle restera spectateur passif d’un savoir qui lui semblera inaccessible.

J’espère que ce partage de réflexion résonnera en vous pour cette rentrée 2021, car plus que jamais les enfants et ados, grandissant dans un monde en pleine mutation, ont besoin d’être soutenus par les adultes qui les entourent au quotidien.

Si cet article vous a plu, n’hésitez pas à le partager, à le commenter, à communiquer avec son autrice :). Bonne rentrée à vous toutes et à vous tous.

Neurosciences et pédagogie

Une séquence en partage

Si cette année 2020 a été fortement chamboulée à tous les niveaux, la vie continue et les bonnes surprises aussi. J’ai été contactée à deux reprises, cette année, pour présenter une séquence pédagogique que j’ai conçue pour mon cours d’Histoire de 3ème année secondaire.

Le déroulement de mon cours a été pensé en me basant sur les trois étapes essentielles décrites dans l’excellent ouvrage de Joseph Stordeur « Comprendre, apprendre, mémoriser : les neurosciences au service de la pédagogie » (De Boeck, 2014).

Lors d’une rencontre avec Nicole Wauters*, qui intervenait dans mon école pour une présentation du FLA et FLSCO (Français Langue d’Apprentissage et Français Langue de Scolarisation), j’ai trouvé beaucoup de similitudes entre les outils FLA et FLSCO et la séquence que j’avais construite. Nicole Wauters m’a donné alors rendez-vous pour une interview. Tout au long de la séquence, Nicole me confirmait que j’avais outillé mes élèves au niveau du langage pour leur permettre d’accéder à la compréhension et à la maîtrise de concepts complexes.

Aujourd’hui, je ne vais pas vous parler de cette séquence mais si elle vous intéresse, je vous invite :

soit à soutenir le magasine « TRACeS de Changements » https://www.changement-egalite.be/TRACeS-246-Ce-que-l-Ecole-exige, dans lequel j’ai écrit un article sur le sujet (p. 24-25), en achetant le numéro 246 (qui par ailleurs est super intéressant, les autres articles sont passionnants).

soit à soutenir l’autrice Nicole Wauters (et les éditions Couleur Livres) en achetant l’ouvrage « Langage et réussite scolaire – Pratiques d’enseignement et français de scolarisation « .

Je vous remercie d’être lectrice/lecteur de ce blog et de suivre mes aventures de professeur expérimentatrice. N’hésitez pas à partager vous aussi vos expériences (en m’envoyant vos articles qui seront publiés sous votre nom), c’est au départ l’essence même de ce site.

Passez de belles vacances à recharger vos batteries…et à lire ;).

* Nicole Wauters : De longues années en tant qu’enseignante à l’école primaire, une expérience de conseillère pédagogique puis d’inspectrice primaire ont permis à Nicole Wauters d’observer les difficultés importantes rencontrées au sein de classes de plus en plus hétérogènes. Diplômée en sciences de l’éducation depuis 2004, elle a participé à de nombreux groupes de travail autour de la problématique du langage scolaire que ce soit dans le cadre de ses missions professionnelles ou comme militante au sein du mouvement ChanGements pour l’égalité (CGé).  (https://www.decitre.fr/livres/langage-et-reussite-scolaire-9782870039069.html#resume)

Lectures, Non classé

Du paradigme de l’éducation

Comme introduction à l’une des formations que j’ai suivies, le formateur nous a présenté cette vidéo. Je n’ai eu de cesse d’en parler autour de moi depuis, tant elle est éclairante, percutante. Bien entendu, la situation présentée concerne l’éducation aux Etats-Unis, mais Ken Robinson pointe également des problèmes inhérents au système scolaire occidentale.

Le format de présentation en mode Videoscribe rend la communication plus efficace, il fallait bien cela pour résumer en 11 minutes plusieurs siècles de construction de notre modèle scolaire. Modèle à déconstruire donc !

Mes expériences de Maman

Concept kids (de Repos production)

J’ai retrouvé cette petite vidéo dans laquelle j’expliquais le fonctionnement du jeu avec un tout jeune enfant de 4 ans, mon fils. Concept Kids n’est plus une nouveauté mais reste jeu qui mérite d’être présenté encore et encore. Il semble simple mais lorsqu’un jeune enfant y joue, il analyse, catégorise, structure son observation…Je vous laisse découvrir la présentation de Concept Kids

Mes expériences de Maman, Non classé

A, B, C…comme Céline, Céline Alvarez et ses lettres magnétiques

Juste avant le confinement, j’ai eu la bonne idée d’acheter les lettres magnétiques de Céline Alvarez. Mon fils de 5 ans est dans une période où la lecture le titille. Il repère des lettres, les reconnaît, les confond aussi, il décrypte, scrute…C’est le moment idéal pour l’aider à structurer ces 26 symboles dans son cerveau.9B944804-5E7C-4738-8553-C26A5702AE98.JPG

Un peu d’histoire :

L’écriture et la lecture sont apparues assez tard dans l’histoire de l’humanité. En effet, il y a un peu moins de 5 000 ans l’homme a commencé à inventer un système de symboles pour transcrire les sons (phonèmes) en graphèmes (lettres ou groupe de lettre). La formation du cerveau de l’homo sapiens étant bien plus ancienne que l’invention de l’écriture, quelle région cérébrale allait stocker cette nouvelle connaissance ? C’est la région qui, chez l’homme comme chez les autres primates, sert à reconnaître les visages, les objets et les formes géométriques qui servira de lieu de stockage. Avant d’apprendre à lire, cette aire cérébrale n’est pas inactive, mais elle sert à autre chose qu’à lire.

En pratique :

Pour que le cerveau mémorise correctement ces 26 symboles, il faudra énormément solliciter la mémoire visuelle. Les jeunes enfants sont avides de connaissances et la plasticité de leur cerveau rend l’apprentissage plus facile qu’à l’âge adulte. Ce nouveau savoir nécessite de la patience et de la persévérance pour l’enfant aussi bien que pour l’adulte qui l’accompagne.

Mes expériences de Maman :

Qu’est-ce qui rend le coffret de lettres de Céline Alvarez différent des autres ? L’utilisation de 3 couleurs pour trier les graphèmes et donner du sens ! En rouge on retrouve les voyelles, en bleu les consonnes et en vert les digrammes tels que : CH, IN, ON, AN, OU.

Lorsque j’ai sorti le coffret de lettres pour la première fois, mon fils a d’abord voulu jouer avec les lettres. Un jeu qui le fait rire au éclats…inventer des mots et me les faire lire. Je l’ai suivi dans cette activité, cependant il y avait une règle pour que je puisse les lire : alterner des bleus et rouges ou des bleus et des vertes. « Idinfisan », « poumava », « moronsa » etc.  Il a bien conscience que ces mots ne veulent rien dire, mais c’est lui qui les écrit. Son bonheur absolu est donc de me faire dire n’importe quoi.

Après ce moment de découverte, je l’ai fait travailler sur des mots dont il connait la signification et qui sont relatifs à des objets ou des animaux qu’il aime voir et utiliser. Mon fils est d’un naturel calme et a une grande capacité de concentration….mais là, il était devenu Monsieur Gigote. Il sentait qu’il ne maîtrisait pas ce nouveau « jeu » et cela le mettait en insécurité. Gigoter était l’expression de ce malaise. La première fois je n’ai donc pas trop insisté.

Deuxième essai deux jours après. Je me suis dis… »tu veux gigoter, tu vas gigoter ». Je lui ai donné 3 lettres semblables. Le B. L’activité consistait à déposer la lettre devant un objet de la maison qui contenait le son /b/. Il a trouvé le « banc », la « balle » et la « poubelle ». J’ai écrit au crayons ces 3 mots sur une feuille que j’ai déposé à côté des objets. Il devait repasser sur les lettres tracées au crayon avec un feutre. Ensuite, je lui ai demandé d’aller chercher dans la boite toutes les lettres permettant d’écrire chaque mot. Il devait donc se déplacer entre l’objet (et son nom inscrit sur la feuille) et la boite de lettres magnétiques placée à quelques mètres de lui.

Quel est l’avantage de cette dernière étape de l’activité ? Pour aller chercher la lettre correspondant à celle inscrite sur la feuille, il doit nécessairement conserver la forme du symbole (de la lettre) dans sa mémoire visuelle. Il va donc devoir trouver un « truc » pour la reconnaître parmi les 25 autres. Il va utiliser sa capacité de discrimination visuelle, outil bien utile pour un apprentissage justement très visuel. Mon fils a ri, a couru, s’est dépassé dans cette activité. Plus de malaise, de nervosité de sa part, mais une joie de travailler en jouant.

Pour des enfants qui ne tiennent pas en place naturellement (j’ai appris récemment qu’on parlait alors d’ « akathisie », plus exotique qu'(hyper)-actif), cette activité leur permet de ne pas mobiliser toute leur énergie à rester assis sans bouger devant leurs lettres.

Variez les postures, encouragez, félicitez, rigolez avec eux, jouez ensemble, amusez-vous…ce sont aussi des étapes indispensables à tout nouvel apprentissage. Cette activité, plus kinesthésique, est une façon parmi beaucoup d’autres de solliciter l’intelligence de l’enfant face à un nouveau savoir. Une fois que l’enfant se sent plus « compétent », dans la maîtrise de cette nouvelle connaissance, il gigotera beaucoup moins.

Il n’est pas nécessaire de mettre constamment en place des activités originales et innovantes pour motiver l’enfant à apprendre. C’est souvent juste le temps d’accrocher une nouvelle connaissance et de faire prendre confiance dans sa capacité à rentrer dans un apprentissage plus complexe.

 

Jeux à la une, Non classé

Spacio, espace et langage

Le jeu a comme objectif principal de développer l’intelligence visuelle-spatiale des plus petits. « Devant », « derrière », « à côté »… la notion d’espace n’est pas toujours évidente à appréhender pour les enfants en âge préscolaire.

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En maternelle :

L’enfant reproduit ce qu’il voit sur l’image en plaçant correctement les animaux sur le plateau. Il est très important que l’adulte, qui accompagne l’enfant, vérifie le placement des animaux en verbalisant la position des objets : « est-ce que ton éléphant est bien devant la girafe ? », « est-ce que le palmier se trouve derrière le singe? » etc. L’enfant développera, grâce à ce jeu, des connaissances qui lui seront fort utiles lorsqu’il abordera les mathématiques, mais aussi la grammaire, les notions de hiérarchie ou de chronologie.

En primaire (à partir de la 2ème primaire) : 

Ce jeu sera un excellent outil pour développer des compétences verbales-linguistiques. On adapte le jeu, cela signifie qu’on utilise le matériel comme base mais on l’adapte aux compétences à travailler.

Utilisation des cartes existantes et création de nouvelles cartes

  1. L’enfant reçoit une carte et écrit ce qu’il voit. L’adulte impose les mots qui doivent être utilisés par l’enfant. On travaille ici l’orthographe du mot, son utilisation dans un contexte précis et on s’exerce !
  2. Les explications écrites par les enfants sont vérifiées entre enfants (idéalement). Un enfant lit ses consignes et l’autre enfant les exécute. On vérifie donc si les instructions sont cohérentes grâce à la carte image qui sert de correctif.
  3. Une fois les écrits corrigés, on réalise au propre les nouvelles cartes qui constitueront la nouvelle pioche. Pour cette variante du jeu, l’enfant tire donc une carte d’instructions qu’il réalise sur le plateau. La carte image associée au texte ne servira que de correction à l’enfant qui joue.

Possibilité d’augmenter la difficulté de l’activité (différenciation)

Rédiger un texte en partant d’un positionnement A des objets sur le plateau et d’amener le joueur à les placer dans une nouvelle configuration B. Ici c’est un vocabulaire plus technique qui sera utilisé : inverser, échanger, placer dans la diagonale, se faire face, …(les objets peuvent également être placés de dos, de profil etc.)

En secondaire (cours de langue)

  • En cours de français : travailler l’implicite en demandant aux ados de contourner les mots relatif au positionnement spatial d’un objet. Création de cartes avec des instructions écrites. Les images servent de correction pour l’ado qui joue la carte « consignes implicites ».
  • En cours de néerlandais, d’anglais, d’espagnol… : travailler le vocabulaire dans une autre langue en utilisant l’activité décrite pour les enfants de primaire (ci-dessus).
Enseigner avec les Intelligences Multiples, Ludopédagogie

Evaluer avec une ESCAPE BOX !

Vous rêvez d’une activité motivante et stimulante pour vos élèves ? D’une activité complexe qui nécessite un  travail d’équipe ? D’une activité qui s’auto-corrige ? Bonne nouvelle, tout ceci est possible à travers l’escape box !

Escape game, escape room, escape box ont le vent en poupe ces dernières années. Le principe : résoudre une série d’énigmes et réussir à déverrouiller portes, cadenas, boites etc.  dans un temps limite…

Données techniques :

Contexte : en classe complète (25 élèves)

Age: 12-13 ans

Lieu : un local de cours

Équipe : enseignante seule

Phase de lancement :

L’activité est partie d’une envie de mettre en projet des élèves de 2S (élèves qui ont échoué au Certificat d’Etude du 1er Degré (= système français : élèves qui recommencent une 4ème)). La classe était divisée en quatre groupes et chacun d’eux avait un cahier des charges précis, à savoir, créer une activité :

  • qui activerait un savoir ou savoir-faire spécifique au cours d’Histoire ;
  • qui devrait être à la fois complexe et réalisable pour des élèves de 2ème ;
  • qui génèrerait un code à 3 chiffres permettant de débloquer un cadenas.

Description des activités créées :

Le thème du chapitre à évaluer portait sur le monde arabe-musulman au Moyen âge et Temps modernes. Voici les activités imaginées par ces élèves :

  1. se rappeler d’une date clé de l’Histoire ;
  2. déterminer la pertinence de documents en fonction d’une problématique de départIMG_1876
  3. replacer des informations dans un texte à trou ;rechercher des informations dans un atlas historique.IMG_1880 2

Mise en place du matériel :

Je ne vous cacherai pas que la confection de 4 escape box m’a pris énormément de temps (+/- 6 heures de travail cumulées). Comme matériel j’ai utilisé :

des boîtes en cartons ou sac avec fermeture éclair de 4 dimensions différentes ;

  • des colsons ;
  • des feuilles de plastification (et une plastifieuse) pour une plus grande longévité des documents  ;
  • des cadenas à coder (à 3 chiffres) ;

Est-ce que cette étape aurait pu être réaliser par les élèves ? Je ne le pense pas. En tout cas pas par des élèves de cet âge-là, dans le temps qui m’était imparti.

Analyse et réflexions

Lorsque j’ai débarqué dans mes classes avec les Escape Box les élèves avaient les yeux qui pétillaient. En terme de motivation l’objectif était atteint.

Concernant le travail d’équipe, les élèves se sont très vite rendu compte qu’ils n’arriveraient à rien si ils ne s’écoutaient pas. La (nécessaire) collaboration s’est d’ailleurs révélée incontournable qu’à partir du moment où un temps limite de 30 minutes a été décrété. (J’ai la chance de donner un cours qui me permet des répétions : cette année-là j’avais six classes de 2ème, cela m’a permis d’expérimenter des variantes.)

Les activités étaient-elles d’un bon niveau ? Les énigmes à résoudre étaient suffisamment complexes et tout à fait atteignables. Pour toutes les équipes que j’ai observées, j’ai remarqué que la résolution des activités demandait réflexion et méthode.

Les activités n’étaient-elles que du jeu ? Pas du tout, les élèves devaient activer des savoir-faire propres à la discipline historique pour être en mesure débloquer un cadenas !

Le seul petit couac que j’ai observé concernait une énigme où les numéros étaient découverts en trois temps…évidemment, il y a toujours un petit malin qui tente de tourner les numéros (espérant débloquer un cadenas sans « effort »), dans ce cas-là le cadenas a été ouvert avant la fin de la résolution d’énigme. J’ai très vite vu l’étonnement, la surprise, le petit sourire malicieux sur leurs visages. Qu’ais-je fait ? J’ai simplement demandé qu’ils me montrent la preuve de l’obtention des 3 numéros. Tant que le groupe n’était pas capable de me justifier leur réponse, il n’avait pas le droit d’ouvrir la dernière boite.

Pourquoi ais-je parlé d’un moyen d’évaluation avec correction automatique ? Car chaque ouverture de cadenas permettait de gagner 5 points. Les groupes arrivant au bout de l’activité en 30 minutes obtenaient 20/20. Ceux qui restaient coincés obtenaient entre 5 et 15 sur 20.

Piste de développement

Une Escape Box est adaptable à n’importe quel contenu et peut porter sur des compétences spécifiques à une matière ainsi que des compétences transversales. Les professeurs de toutes les disciplines peuvent donc se lancer !

La question la plus importante à se poser concernant la création la Box est :

« Est-ce le professeur qui conçoit les énigmes ou les élèves ? »

Comment trancher ? Voici quelques questions pour vous y aider :

  • Est-ce que les élèves apprendront plus ou tout autant sur la matière en concevant la box ?
  • Est-ce que le temps consacré à la réalisation de la box est un investissement intéressant pour le professeur et les élèves ?
  • Est-ce que je veux uniquement tester mes élèves sur des savoirs et savoir-faire ?
  • Est-ce que la création de la box mettra le potentiel de certains élèves en avant ?

 

Enseigner avec les Intelligences Multiples, Ludopédagogie, Non classé

Pourquoi faire créer un jeu des sept familles ?

Le jeu des sept familles se révèle très intéressant lorsqu’on demande aux élèves d’en créer un. Dans le cadre d’atelier Intelligences Multiples la tâche consistait à résumer un chapitre sous la forme d’un jeu des sept familles. Je vous explique tout dans la vidéo ci-jointe !

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Souhaïb, Charlotte et Idriss  connaissaient le principe du jeu et ont très vite entrepris de trouver les grands thèmes du chapitre. Voici ci-dessus un aperçu du résultat de leur travail !